En 2010, lorsque je me suis installé « de novo » en pratique privée, en raison individuelle, j’ai découvert tout ce qu’il fallait organiser. Personnel, appareillage, consommables et matériel informatique, sans compter les tracasseries administratives des assurances. Le coût en était élevé, mais cette démarche fait partie de l’esprit d’entreprise que nous devons assumer pour accéder à la pratique libérale.
A mesure qu’un cabinet se développe, on découvre la charge fiscale et assécurologique (surtout AVS) croissante en lien avec l’augmentation des revenus et la réduction de la dette bancaire. Fin 2017, je pose la question à ma fiduciaire d’une transformation en Sàrl. En effet, le Canton de Vaud venait d’annoncer l’entrée en vigueur dès 2019 d’une réforme de l’imposition des entreprises (RIE III), réduisant le taux d’imposition des bénéfices de 20.85% à 13.8%. À l’époque, mon conseiller m’a dit que cela ne vaudrait probablement pas la peine me concernant. Dans le doute, j’ai sollicité un second avis auprès d’une autre fiduciaire qui m’a dit… exactement le contraire.
Une transformation profitable
A priori, la Sàrl ne présentait que des avantages :
- Le médecin est employé, ce qui implique donc un revenu annuel prévisible et maîtrisé, non soumis à des fluctuations annuelles de la charge fiscale.
- Une Sàrl étant constituée de parts sociales, sa vente future (par exemple lors de la remise du cabinet) se fera selon les règles du gain en capital exonéré (conditions à respecter) ; cette forme juridique permet également à de nouveaux partenaires de joindre la Sàrl facilement en contribuant à augmenter son capital.
- Même si le revenu sous forme de salaire est fixe, une part variable découlant du dividende peut être attribuée au médecin sur la base du bénéfice réalisé ; lors de sa distribution, elle est soumise à un impôt anticipé et sera taxée à un taux spécial dans la fiscalité privée du médecin (conditions à respecter). Un rapide calcul permet d’estimer l’économie fiscale annuelle ainsi réalisée, multipliée par le nombre d’années d’activité.
- Le taux de cotisation AVS étant d’environ 10% du revenu brut, il est facile à anticiper si un salaire est fixe, sans « rattrapage » nécessaire ultérieurement ; en revanche, le bénéfice, donc le dividende attribué au médecin salarié, n’est pas soumis aux cotisations sociales. Toutefois, certaines règles de répartition entre salaire et dividende doivent être respectées.
Six ans après le passage à une Sàrl, tout en m’associant à un autre médecin, le seul inconvénient identifié est le coût : environ 15’000 CHF (frais de fiduciaire et notariés, inscription au registre du commerce, renégociation de toutes les polices d’assurances). Cela dit, ce montant est largement compensé par l’économie fiscale et de cotisations AVS réalisée ensuite. Seul regret : nous ne sommes pas assez préparé·es, durant notre cursus, aux tenants pragmatiques de l’installation en cabinet et de ses aspects économiques, fiscaux et juridiques. Pour cette raison, il est important d’être accompagné·es par les bons partenaires et prestataires de services.