Si l’Autorité et la Justice requièrent souvent le médecin de nos jours, comment appréhender cette situation à l’aune des siècles passés ?
Dr Philippe Vuillemin
Médecin généraliste
Trois ouvrages importants laissent apparaître en filigrane le rôle du médecin : Le Code criminel de Charles Quint, dit « La Caroline » de 1530, revu en 1767 ; Le système de la jurisprudence criminelle du Pays par François Seigneux, juge à Lausanne (1756) ; et enfin Le Commentaire du Coutumier du Pays de Vaud de 1796.
La Question est l’ultime recours du juge face à un prévenu qui n’avoue pas. Il y a plusieurs niveaux de Question : la menace, la présentation de la salle de torture ou encore l’estrapade. Le prévenu doit pouvoir supporter. Des critères ne permettant pas la Question sont énoncés et pour cela on devine, quand ce n’est pas stipulé comme en 1714 ou 1748 par exemple, que cela requiert un avis médical. Ne sont pas soumis à la Question, les impubères, les sourds, muets, malades et blessés, le vieillard, la femme enceinte et « les aliénés ». Reconnus comme « hors de sens et qui n’ont pas le libre usage de leur raison », ces derniers ne peuvent pas être condamnés.
Le corps des victimes d’homicide doit être « visité » par des chirurgiens pour rendre compte de la nature des blessures. En 1749, le Dr Levade et deux sages-femmes doivent par ailleurs « visiter » une femme pour s’assurer qu’elle n’est pas enceinte. Il en est de même lors de soupçons d’avortement, puni de mort. F. Seigneux demandant aux magistrats de veiller à la salubrité des prisons, quelques médecins les inspectent, veillant à l’air et la lumière.
Les médecins peuvent toutefois aussi se retrouver prévenus : le Coutumier du Pays de Vaud dit que « le médecin qui fait mourir un malade par ignorance crasse des principes de la médecine, est coupable de meurtre », ce qui peut mener à l’échafaud.