L’âge, c’est non
Fin mai, le Tribunal fédéral (TF) a annulé la limite d’âge de 80 ans pour l’exercice de la médecine fixée par le Canton de Neuchâtel, jugeant qu’elle n’était pas conforme au Droit fédéral. Merci et longue vie donc au Dr Jobin, spécialiste en médecine interne générale et en médecine du sport à Neuchâtel, qui a mené ce combat juridique autant pour lui-même que ses patients. Grâce à lui, c’est maintenant clair dans tout le pays : un médecin ne doit pas se voir refuser l’autorisation d’exercer la médecine uniquement en raison de son âge.
En 2023, DOC avait consacré un dossier complet à la question des médecins pratiquant après l’âge officiel de la retraite (« 65 passés et toujours en activité »). Outre l’exception tout de même notable d’une cardiologue nonagénaire en pleine forme, on y rappelait surtout que le canton de Vaud avait pour le moins besoin de ses presque 400 médecins « seniors ». Sans leur engagement, la bonne prise en charge de dizaines voire de centaines de milliers de patient.e.s serait de facto affectée, pour ne pas dire menacée.
Dites (1 sur) 33
Depuis le 1er juillet 2025, les cantons n’ont cependant plus le choix. Ils doivent formellement dire comment limiter le nombre de médecins admis à pratiquer à la charge de l’AOS sur leur territoire, en vertu d’une modification de la LAMal de 2020 et de deux ordonnances fédérales consécutives de 2021 (nombres maximaux de médecins) et 2022 (taux régionaux de couverture des besoins par domaine de spécialisation).
Depuis plus de trois ans, l’application de cette clause du besoin d’un nouveau genre a fait l’objet d’intenses discussions entre l’Office du Médecin cantonal, la Société vaudoise de médecine, les groupements de discipline médicales, l’Association des médecins assistant.e.s et chef.fe.s de clinique et les services de formation postgrade du CHUV. Avec une attitude pragmatique et constructive que la SVM peut saluer. Ainsi, dès 2022, la médecine interne générale, la pédiatrie, la gynécologie-obstétrique, puis la psychiatrie et psychothérapie (adultes, enfants et adolescents) ont d’emblée été exclues de toute limitation, vu la pénurie évidente.
Des 33 autres spécialités ensuite passées sous la loupe, seule une limitation de 4 d’entre elles a été retenue. Et encore : pour la cardiologie, l’urologie et l’ophtalmologie (dans la région lausannoise seulement), il s’agit uniquement de définir une « limitation proche du nombre actuel d’EPT », dixit le Canton. Finalement, ce n’est qu’en neurochirurgie qu’on constaterait un risque de suroffre et donc un intérêt mutuel à réguler. Mais avec un impact sur les coûts de la santé a priori relatif, vu la poignée de médecins concernés.
Réviser la LSP ?
Pour mettre tout ceci en musique à l’échelle cantonale, un Conseil d’Etat motivé avait mis en consultation à fin 2023 un avant-projet de révision partielle de la Loi sur la santé publique « afin d’y ancrer le principe de la limitation de l’admission des médecins et de déléguer la compétence de limiter au Conseil d’Etat ». Par voie d’arrêté le 2 juillet 2025, il aura finalement décidé de s’accorder cette compétence tout seul, sans passer par le Grand Conseil. La SVM espère que ce n’est que partie remise : un peu pour que puisse se tenir un vrai débat sur la meilleure façon de limiter ; beaucoup pour ne pas oublier de s’intéresser aussi à la lutte contre la pénurie, la vraie réalité actuelle ou prochaine de 38 des 39 spécialités médicales (et de leurs patient.e.s !) dans ce canton en croissance.