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Visite médicale - Dr Sébastien Jotterand

« Nos subjectivités peuvent creuser nos différences »

A quel âge et pourquoi avez-vous eu envie de devenir médecin ?

À mes 10 ans, lorsque mon prédécesseur André Brot, qui était notre voisin et ami, m’a emmené faire un tour dans les splendides et sauvages gorges de l’Orbe, nous sommes tombés au retour sur une épaisse couche de mousse qui dénaturait un bassin, quel choc ! Heureusement, il prit la décision d’aller signaler cette pollution à la gendarmerie, ce qui me soulagea beaucoup. En rentrant, j’ai dit à mes parents que je voulais devenir médecin. D’ailleurs, près de trois décennies plus tard, je suis retourné avec ma famille à Aubonne pour reprendre le cabinet de mon médecin André Brot, un retour aux sources !

Qui a été votre mentor et que vous a-t-il appris ?

Comme mentor, je citerai d’abord mon père, Franck, qui s’était extirpé de la terre aubonnoise pour aller dans les étoiles de Paris, puis new York, rejoindre Martin Scorcese avec qui il avait mangé des pâtes chez sa grand-mère dans le Bronx. Elle lui avait raccommodé un bouton de son imper que j’ai gardé précieusement comme une relique ! Mon père aimait le cinéma et était la seule personne au monde à avoir été capable de m’expliquer le film 2021 l’Odyssée de l’espace. La culture, pour lui, qu’elle soit populaire ou plus pointue, devait toujours être de qualité, par respect pour les gens. Et la culture se vivait, en particulier à la maison ouverte aux artistes, écrivains, cinéastes. Je dormais au-dessus de la salle à manger, bercé par le brouhaha de leurs échanges, éclats et rire, ou les cliquetis de la frappe sur la machine à écrire Hermès sur laquelle mon père tapait à deux doigts.

Quelle a été votre expérience la plus marquante avec un patient ?

C’était dans le cadre de ma formation en médecine ambulatoire en policlinique. Je faisais l’expérience des psychodrames Balint conduits par le Dr Jean-Pierre Bachmann. Un jour, je joue un patient diabétique d’origine hongroise, aveugle, qui avait une longue liste de doléances et insistait toujours pour aller faire une cure thermale à Bad Ragaz et m’irritait beaucoup… C’est alors que le Dr Bachmann me conseilla de fermer les yeux : toute la détresse de ce patient confronté à un jeune médecin assistant (moi !), qui refusait de comprendre ce qu’il lui demandait, m’envahit d’un coup. Cette expérience de nos subjectivités réciproques qui peuvent creuser nos différences et nous empêcher d’être attentif à l’autre me marquera à jamais. Trouver le lien empathique nous permet de les combler.

Pourquoi avoir décidé de vous engager dans la politique professionnelle ?

En 2009, j’avais été impressionné par la séance de fondation de l’association suisse des médecins de famille de l’enfance, en musique et cravate rouge, présidée par Peter Tschudi, président du Congrès. Lorsque, quelques années plus tard, dans la télécabine de la Plaine Morte à Quadrimed, Maïette Fonjallaz et Hedi Decrey me proposent de rejoindre le comité de Médecins de Famille Vaud dont elles font partie, un nouveau chapitre de mon engagement pour la médecine de famille commence.

Aujourd’hui, je préside la plateforme interprofessionnalite.ch depuis quatre ans, co-préside l’association Médecins de famille et de l’enfance Suisse (mfe) et partage depuis 2020 ma pratique au sein d’un centre social interdisciplinaire et interprofessionnel de l’EHC à Aubonne, à 200 mètres de mon ancien cabinet.

Pouvez-vous nous parlez un peu plus de votre engagement pour l’interprofessionnalité ?

Après un diplôme pour le suivi des patients avec une maladie chronique, je fais, en parallèle 10 ans de recherche pour favoriser l’intégration du soutien à l’autogestion dans nos cabinets de médecine générale jusqu’au Congrès Swissfamily doc à Bâle en 2009, tenu en même temps que celui de la Wonca, lors duquel nous gagnons le prix du meilleur poster avec le projet cap-diab du Réseau Nord Broye, extension de mon travail de diplôme. Par la suite, c’est avec le professeur Olivier Bugnon et toute l‘équipe de la start-up Sispha que nous commercialiserons un programme de soutien à l’adhésion thérapeutique dans les pharmacies de Romandie, inspiré de ce qu’il faisait à la PMU, avec toujours ce plaisir de travailler avec des personnes issues de formation et d’horizons différents. C’est ainsi que je préside depuis 4 ans la plateforme interprofessionnalité dans les soins de santé primaires.

Bio express

Âge : 61 ans

Diplôme : Spécialiste FMH en médecine interne générale (1990), Spécialisation en médecine tropicale (1994, Anvers), Diplôme d’éducation thérapeutique pour les maladies chroniques (2002)

Activité : Pratique au Centre médical de l’EHC à Aubonne, co-président de mfe et président de la plateforme interprofessionnalité.ch

Situation familiale : Marié, deux enfants adultes, un berger suisse

Hobbies : Balade en nature, à pied, vélo, ski de fond ou voile, musées et jardinage

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