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Politique

Sans transparence, les souris dansent !

Après un premier coup de semonce en matière de prédictions de hausse des coûts de la santé en février déjà (avant même de disposer des estimations du 4e trimestre 2021…), une deuxième salve tirée le 3 avril dans la presse dominicale a fortement résonné en Suisse. Alertés par le bruit d’une augmentation apparente des coûts de 5% en 2021, de nombreux médias et politiciens l’ont alors relayée, évoquant même une flambée brutale des primes de 9% pour 2023. Info, intox, poisson tardif ?

Côté assureurs maladie, la tactique est connue et bien rodée. Il s’agit de prédire en amont des hausses des coûts justifiant des demandes de hausse des primes, que l’OFSP pourra valider sans sourciller à la sortie de l’été. Et désormais sans aucune ingérence des cantons, auxquels l’accès au mode de calcul des primes a été retiré. Les prédictions étant systématiquement surévaluées, les réserves enflent inexorablement, sans possibilité légale de les réduire.

Du côté des fervent-es défenseur-es d’un secteur public fort et généreux, les milliards de la santé font aussi rêver. Pas pour les accumuler, mais pour les dépenser soi-même, sans trop en laisser au secteur privé. Des coûts de la santé en hausse ne sont ainsi pas dénués d’intérêt, pour autant qu’ils soient liés à une étatisation croissante de la santé, et que l’on prévoie simultanément d’atténuer l’impact des primes par des subventions individuelles. Avec une reconnaissance espérée du citoyen dans les urnes ?

Le Conseil fédéral tiendra-t-il parole ?

Malheureusement, les solutions que promeuvent aujourd’hui ces allié-es de circonstance n’auront aucun effet sur les deux causes de la hausse lente, mais irrémédiable, des coûts à charge de l’assurance maladie obligatoire : le vieillissement de la population et le transfert du stationnaire vers l’ambulatoire. Plafonner les dépenses, tel que proposé par l’article 47c de la LAMal en discussion au Parlement, serait même catastrophique pour les patient-es. Il n’en résulterait qu’un rationnement des soins et la légalisation d’une médecine à plusieurs vitesses, en fonction des capacités financières de chacun-e.

Les prophéties de hausse des coûts de la santé doivent ainsi être écoutées avec la plus grande prudence. Comparer 2021 avec 2020, année de baisses d’activité très importantes du fait de l’interdiction des prestations non urgentes et de la fermeture des cabinets pendant les confinements, n’est pas adéquat, ou tendancieux. Il faut comparer sur plusieurs années, selon différents intervalles (cf. tableau ci-dessous). Des primes perçues en trop continuent donc d’alimenter les réserves qui approcheront sans doute les 13 milliards de francs à fin 2021. Les modestes ristournes encouragées n’y changeront rien.

Puisque les coûts réels 2021 ne seront consolidés par l’OFSP que cet automne (après l’annonce des primes 2023…), on recommandera à notre lectorat désireux d’un avis neutre de se fier pour l’instant aux calculs de l’Office fédéral de la statistique, repris dans le tableau de bord économique mis en ligne par le journal Le Temps . Il relate une baisse continuelle des coûts de près de 3% dans le calcul de l’indice des prix à la consommation au cours des trois dernières années ! En attendant que le Conseil fédéral tienne sa promesse faite en 2020 devant le Conseil des Etats d’améliorer la transparence en la matière, cela permettrait de déterminer sur une base objective les effets des mesures de rationnement mises en discussion au parlement.

Le chiffre

3
L’OFS a observé une baisse continuelle de près de 3% des coûts de la santé dans le calcul de l’indice des prix à la consommation au cours des trois dernières années. Cette information a été reprise dans le tableau de bord de l’économie suisse lancé au printemps 2022 par le journal Le Temps.

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