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Dossier électronique du patient: en Autriche, toutes les parties satisfaites !

Le dossier électronique du patient (DEP) existe en Suisse depuis maintenant plusieurs années, au travers d’expérimentations plus ou moins fructueuses. Il y a plus d’un an, il est même devenu obligatoire dans les hôpitaux. Pourtant aux yeux de la population et des professionnels de santé indépendants, il est passé inaperçu jusqu’à se demander s’il est vraiment disponible.

© Laurent Kaczor

Interpelé sur les lenteurs de l’adoption du DEP, le Conseil fédéral a commandé à Ecoplan AG un rapport sur les mesures à prendre pour accélérer sa mise en œuvre et promouvoir sa pleine utilisation.

Un DEP plébiscité par la population

Afin de décider des mesures à recommander, les auteurs ont eu la bonne idée de franchir nos frontières et d’aller voir comment les choses se passent du côté de l’Autriche notamment. Et force est de constater qu’elles se passent plutôt bien !

Les différences de stratégie avec la Suisse et la philosophie du projet sont très intéressantes. Les Autrichiens peuvent compter depuis 2015 sur un dossier électronique gratuit baptisé ELGA, géré et financé par une société en mains de l’Etat fédéral, les Länder et les assurances sociales. La Suisse, elle, compte sur des acteurs privés (communautés) qui se lancent avec une subvention au démarrage et doivent ensuite trouver un modèle de financement rentable.

Quand les Suisses doivent activement demander l’ouverture de leur DEP (opt-in) et la création de leur clé d’accès numérique avec des processus compliqués et peu matures, les assurés autrichiens se voient automatiquement attribuer un ELGA accessible avec leur passeport numérique. Ils/elles ont évidemment la possibilité de le refuser (opt-out), mais seulement 3% des gens recourent à cette option, si bien qu’ELGA compte actuellement près de 8 millions de dossiers.

© Nicolas Zentner

Faciliter au lieu de contraindre

Les autres bonnes trouvailles ne manquent pas dans l’exemple autrichien et devraient inspirer nos autorités à réviser en profondeur la stratégie suisse. En Autriche, les prestataires et établissements dont les soins sont remboursés par l’assurance doivent obligatoirement se raccorder à ELGA. Mais pour eux, contrairement à la Suisse, l’usage de portails internet où les données doivent être ressaisies manuellement est proscrit ! ELGA ne doit jamais être une corvée administrative supplémentaire. Les éditeurs de logiciels médicaux ont été impliqués dès les balbutiements du projet en 2007 et l’intégration d’ELGA dans leurs outils est native et standardisée.

L’interopérabilité sémantique des données a été érigée en règle absolue : pas question de créer un cimetière de PDF. Seuls les types de documents et données structurées harmonisés à l’échelle de tout le pays sont acceptés. ELGA constitue l’infrastructure e-Health unique qui connecte tous les acteurs de manière normée et homogène ; il n’y a pas de risque, comme en Suisse, de voir une communauté développer des produits non interopérables.

Pour l’heure, ELGA propose essentiellement trois services, considérés comme critiques pour le succès d’un dossier électronique : le partage de documents (rapports, analyses, images), la médication partagée et le carnet de vaccination. Ces deux derniers manquent cruellement au DEP suisse et devraient être une priorité.

Les besoins des patients au cœur du DEP autrichien

Dernière grande différence : l’«empowerment du patient», prôné par le DEP. En Autriche, l’utilisation du portail ELGA par les patients est totalement marginale. L’intérêt des patients ne se situe pas dans la lecture de rapports médicaux abscons ou dans la gestion des droits d’accès de chaque document comme imaginé dans le DEP. Les patients autrichiens attendent juste de leur dossier d’être pertinent et utile aux professionnels qui les suivent et s’occupent de leur santé.

Si en Suisse, l’heure est déjà au bilan, alors que le DEP n’a pas encore pris son envol, espérons que le Conseil fédéral saura retenir le meilleur des exemples qui marchent pour adapter sa stratégie : c’est-à-dire proposer un DEP simple, utile et efficace.

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“…….. Les éditeurs de logiciels médicaux ont été impliqués dès les balbutiements du projet en 2007 et l’intégration d’ELGA dans leurs outils est native et standardisée.,,,,,,” That is the Swiss problem !!!!

BRAVO …. Les Autrichiens peuvent compter depuis 2015 sur un dossier électronique gratuit baptisé ELGA, géré et financé par une société en mains de l’Etat fédéral, les Länder et les assurances sociales. La Suisse, elle, compte sur des acteurs privés (communautés) qui se lancent avec une subvention au démarrage et doivent ensuite trouver un modèle de financement rentable.

TELLEMENT VRAI!!!
Quand les Suisses doivent activement demander l’ouverture de leur DEP (opt-in) et la création de leur clé d’accès numérique avec des processus compliqués et peu matures, les assurés autrichiens se voient automatiquement attribuer un ELGA accessible avec leur passeport numérique.

Y-a-t.il une étude comparative sur les zones (regroupements de cantons) qui marchent mieux que d’autres ?