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Etat des lieux

De la création à la révision du DEP

La cybersanté a le vent en poupe, et le dossier électronique du patient (DEP) est un pas logique à franchir à l’ère du tout digital. Il stocke les données principales sur le/la patient·e, qui peut décider de donner l’accès à ses données, ou à une partie définie, aux professionnel∙les de la santé de son choix.

Le chiffre

0,45
Pourcentage de la population vaudoise ayant ouvert un DEP à fin août 2023.

Trois points semblent cependant freiner le développement du DEP à différents niveaux : le financement de son introduction et de sa mise en œuvre, la diversité des interfaces et la convivialité. Jusqu’en août 2023, seuls 25’213 DEP avaient été ouverts en Suisse, ce qui signifie que 0.28% de la population en possède un. Sur le territoire vaudois, un total de 3631 DEP a été atteint à cette même date, ce qui équivaut à 0.45% de la population vaudoise.

Tour d’horizon légal

La loi fédérale sur le dossier électronique du patient (LDEP) est en vigueur depuis le 15 avril 2017. Pour une mise en œuvre efficace et une adhésion forte au DEP, des compétences légales, informatiques et organisationnelles sont nécessaires et doivent être coordonnées. En effet, afin de protéger les données des patient·es, les processus de certification des communautés ont duré plus long que prévu et ont, de ce fait, repoussé l’obligation de participation au DEP qui touche les hôpitaux de soins aigus, les cliniques psychiatriques et de réadaptation, les établissements médico- sociaux et les maisons de naissance. S’y ajoutent les cabinets ouverts après 2022. Ces professionnel·les de la santé sont en outre tenu·es d’enregistrer des informations de santé importantes dans le DEP dès lors que le/la patient·e en a ouvert un. La participation est facultative pour les autres actrices et acteurs de la santé (médecins de famille, pharmacies, services d’aide et de soins à domiciles, physiothérapeutes…).

Selon le baromètre cybersanté 2023, seuls 13% des cabinets médicaux, 44% des hôpitaux et 4% des pharmacies sont équipés. Pour y remédier, le Conseil fédéral (CF) a mis en consultation le projet de révision complète de la LDEP lors de sa séance du 28 juin 2023. « Le DEP, c’est efficace » est une campagne lancée en juin dernier auprès des professionnel·les de la santé afin d’augmenter leur adhésion. Le CF aimerait légiférer afin que les Cantons vérifient que les cabinets médicaux, les pharmacies et les fournisseurs de prestations ambulatoires soient tous raccordés au DEP. Concernant les patient·es, un dossier serait automatiquement ouvert par défaut pour chaque personne domiciliée en Suisse et soumise à l’assurance maladie obligatoire. La possibilité d’un « opt-out » du/de la patient·e serait possible en avisant le Canton.

En date du 6 octobre 2023, le Conseil d’Etat vaudois a envoyé sa prise de position au CF. Le Canton de Vaud soutient dans l’ensemble les propositions du CF, dont le modèle d’ouverture automatique d’un DEP avec opt-out, ainsi que l’obligation d’affiliation pour chaque professionnel·le. Il demande cependant une plateforme technique nationale unique, car la multiplicité des acteurs et actrices et des solutions techniques semble avoir freiné l’adhésion au DEP. Il souhaite également une obligation de certification pour les fournisseurs de logiciels de santé, et une obligation d’intégration dans le développement de ces derniers. Finalement, la protection des données du DEP (traitement, stockage et suppression) doit être couverte suffisamment dans la loi.

Les communautés de référence et les moyens d’identifications certifiés

Pour avoir un DEP, il faut s’inscrire dans une communauté (de référence). Depuis décembre 2021, huit sont certifiées en Suisse. Chaque Canton a l’obligation de financer au moins l’une d’entre elles, disponible sur son territoire. Il s’agit de eHealth Aargau (eMedo), Südost (eSanita), CARA, Mon Dossier Santé, l’Associazione e-Health Ticino (eHTI), Post Sanela Health (ex-XAD), ABILIS et AD Swiss. CARA, la communauté la plus présente en Suisse romande, a été mise en service en mai 2021. Elle englobe les cantons de Vaud, Genève, Fribourg, du Valais et du Jura. Neuchâtel utilise Mon Dossier Santé, et c’est à ce jour le canton qui connaît la meilleure adhésion (plus de 3600 DEP, soit 2% de la population neuchâteloise). ABILIS, développée par l’OFAC en collaboration avec Pharmasuisse, est la communauté de choix pour les pharmacies. La grande question est celle de l’interopérabilité. Il est crucial que les différentes communautés et interfaces soient compatibles. Notons que pour la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), le DEP devrait être piloté et financé de manière centralisée et uniforme, puisque l’approche décentralisée ne s’est pas avérée judicieuse jusqu’ici. Elle prône une fusion des huit fournisseurs de DEP certifiés en une seule et unique institution d’exploitation.

A ce jour, il y a cinq moyens d’identification certifiés conforme au DEP. Il s’agit de TrustID, GenèveID, VaudID-santé (tous trois proposés par ELCA), ainsi que Swiss ID (la Poste) et HIN-ID (HIN). La première vérification d’identité est censée se faire en personne, mais le processus de vidéo-identification commence à se mettre en place et à être autorisé.

Qu’en pense la population?

Le Baromètre cybersanté 2023 montre que l’âge influence le choix d’ouvrir un DEP, les personnes âgées ayant peur de ne pas y arriver. La majorité de la population suisse (58%) estime que le DEP est une bonne ou une très bonne chose. Seuls 11% sont d’un avis contraire. Très peu de personnes possèdent un DEP, et son évaluation a donc été difficile. Environ 40% des personnes interrogées seraient disposées à ouvrir un DEP, plus particulièrement si elles pouvaient le faire chez leur médecin traitant. Actuellement, environ un quart de la population s’oppose au DEP.

D’un autre côté, le soutien est particulièrement élevé, atteignant environ 75%, parmi les services de soins à domicile (Spitex). Cependant, il est plus faible chez les professionnel·les de la santé, avec un peu plus de 60% d’approbation, ainsi qu’auprès des maisons de retraite et des établissements de soins où il s’élève à environ 55%. Il est intéressant de noter que pour les responsables informatiques des hôpitaux, l’attitude positive et l’engouement envers le DEP a chuté de 71% en 2018 à 22% en 2023.

Etat au 08.11.2023

A retenir

Tour d’horizon du DEP depuis ses débuts en 2017 et de ses enjeux : financement, adhésion des professionnel ·les de la santé et de la population, fonctionnement, interopérabilité et protection des données. La révision de la loi en consultation va-t-elle permettre de résoudre certaines de ces questions ?

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