C’est en suivant les cours du Prof. Pierre-André Michaud que j’ai su que je voulais travailler en ambulatoire plutôt qu’en milieu hospitalier et m’occuper des adolescent-es. J’ai été nommée cheffe de clinique à la DISA (Division interdisciplinaire de santé des adolescents) au CHUV où j’ai effectué mon FMH de médecine interne générale. C’était le poste de mes rêves et j’étais sûre que j’y resterais jusqu’à ma retraite…
Un cadre rassurant et contraignant
A mes yeux, l’avantage de l’institution réside dans le fait que nous étions bien encadré-e-s et que nous travaillions dans le cadre de protocoles bien établis. Pourtant, je me suis vite rendue compte que j’avais besoin de plus de liberté pour exprimer ma créativité. Je savais aussi que la possibilité de devenir cadre dans une petite division pouvait prendre plusieurs années.
Difficile également d’évoluer dans un autre hôpital, les deux centres pour ados se trouvant à Genève et Lausanne. Le cheminement vers une pratique médicale à titre d’indépendante a été progressif.
En 2019, j’ai suivi un cours intitulé « ouvrir un cabinet de groupe » proposé par FMH Services. J’avais entretemps vu des locaux à Montreux qui semblaient appropriées pour ouvrir un cabinet de groupe dédié à la santé des ados et j’ai profité de l’occasion pour échanger avec un architecte présent. Un rendez-vous a été fixé la semaine d’après. A la même période, j’ai aperçu par hasard une voiture arborant une publicité pour une petite société spécialisée dans la remise de cabinets médicaux qui m’a renvoyée vers un autre interlocuteur spécialiste dans le consulting pour cabinets médicaux. Autres éléments qui m’ont confortée dans ma démarche : le soutien de mon projet par ma cheffe à la DISA, ainsi que les besoins d’un cabinet décentré.
Une liberté qui a un prix
Les planètes étant alignées, j’ai donné ma démission et mis sur pied mon équipe composée uniquement de personnes que je connaissais.
Ce que je ne savais pas encore, c’est que l’ouverture du Centre Ados Riviera prévue en six mois m’a finalement pris dix-huit mois…
J’ai dû entretemps accepter un remplacement. Actuellement, notre équipe compte un pôle somatique (deux pédiatres 12-25 ans, une gynécologue et moi comme généraliste), un pôle psy (une pédopsychiatre, quatre psychologues) ainsi que deux ergothérapeutes, une diététicienne et un infirmier mobile en santé mentale. Une collaboration s’est naturellement mise en place avec le CHUV et l’Hôpital Riviera-Chablais, mais nous avons surtout réussi à établir des liens forts avec les pédiatres de la région.
L’ouverture du centre n’a pas été un long fleuve tranquille, en raison aussi de la pandémie. Ma vie familiale n’en a pas forcément pâti car les horaires irréguliers et la charge de travail faisaient déjà partie de mon quotidien en milieu hospitalier. J’ai aussi la chance de pouvoir compter sur un conjoint qui a plus de souplesse dans son travail (il n’est pas actif dans le domaine médical !) et peut ainsi gérer les imprévus vis-à-vis de ma fille de 8 ans. Mais il y a d’autres sources de stress lorsque l’on est indépendante et que l’on doit mener ses consultations, tout en gérant les RH, les finances et l’administratif. Mon cerveau n’est jamais au repos. J’essaie désormais de mieux déléguer et de me garder un peu plus de temps pour ma vie privée.
Avec le recul, je me dis que mon travail à l’hôpital était plutôt simple. Mais le besoin de liberté prend le dessus et je n’imagine pas y retourner, sauf pour un petit pourcentage en ambulatoire. Si je devais revivre cette expérience de l’installation, je prendrais plus de contacts avec des médecins qui en ont fait l’expérience. Je conseille également de parcourir le Guide du médecin publié par la SVM et la brochure de l’ASMAV sur l’ouverture d’un cabinet médical qui abordent de manière pragmatique les différentes options et étapes de ce parcours.
Bravo Jennifer, un beau challenge que tu as relevé.