Publicité

Introduction

Le dirigisme est-il la bonne direction ?

Tout le monde s’accorde sur un point : l’offre des soins à la population est en crise et il faut trouver des solutions pour l’améliorer. Vous lirez dans ce numéro des points de vue variés sur Réformer (Réorganisation de la formation post-graduée en médecine en Suisse romande), présentant les forces et défauts de cette méthode choisie par l’Etat.

Nicolas Zentner

Il est probable que beaucoup d’entre vous n’en ont pas entendu parler. Pourtant, la phase opérationnelle a débuté en 2022 et change fondamentalement l’orientation de la formation médicale post-graduée. Même les personnes les plus concernées, à savoir les étudiant-es en médecine qui voudront choisir une spécialisation, sont 80% à ne pas être au courant du projet, selon le sondage effectué par la SVM. On y voit une première lacune : la communication.

Si l’idée est louable de vouloir pallier la pénurie de médecins de premier recours ou de spécialités en déshérence, la méthode démontre qu’elle a été planifiée par des personnes hors de la réalité du terrain, idéalistes mais irréalistes. Qu’en est-il de «l’humain» ? Qu’en est-il de la motivation du médecin ? Les administrateurs/trices pensent-ils/elles qu’il s’agit d’un luxe que de vouloir choisir sa spécialisation ? Que le médecin est un «fonctionnaire» qui effectue une tâche dans un horaire donné ? On pourrait tout aussi bien dire aux étudiant-es ayant fini leur maturité : celle-ci fera mathématiques et celui-là sociologie… Réformer ne doit pas rimer avec démotiver, d’autant plus que bon nombre d’étudiant-es se sentent déjà perdu-es et souvent peu informé-es. Un mentoring structuré est nécessaire pour valoriser les différentes spécialités, que ce soit en cabinet, hôpital ou encore dans le milieu académique.

Rappelons par ailleurs qu’une âme de chirurgien-ne n’est pas une âme d’endocrinologue, qu’un-e psychiatre perçoit la relation thérapeutique autrement qu’un-e gynécologue… Et que la bonne personne au bon endroit en fait un bon médecin. Que cette variété propre à chacun-e permet de couvrir tous les besoins de la médecine plurielle. Si Réformer continue sur la voie de la planification forcée, il y a de fortes chances que cette réorganisation « produise » des médecins qui ne se sentiront pas à leur place, seront moins performants, moins engagés et in fine moins disponibles. Beaucoup risquent de changer de profession. Quelle perte d’investissement aux niveaux humain et financier ! Tout cela amenant à une baisse de la qualité des soins à la population. Est-ce vraiment ce que l’on veut ?

Pour diminuer la pénurie et mieux orienter les futurs médecins, ne faudrait-il pas améliorer l’attractivité de ces spécialités ? Ce n’est malheureusement pas le chemin pris par l’Etat, comme le démontrent ses dernières décisions à l’encontre du corps médical. Mais il n’est pas trop tard pour corriger le tir. Utiliser le travail déjà fait en y incluant les personnes du terrain, des chiffres réalistes, en améliorant la communication, en travaillant sur la valorisation, peut encore nous permettre d’aller vers une meilleure répartition de l’offre de soins, tout en améliorant la qualité ! Gardons espoir…

Partagez votre opinion sur cet article !

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires