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Clause du besoin des cabinets

Nouvelle donne ?

Depuis son introduction en 2002, la clause du besoin – ou limitation de l’admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à charge de l’assurance obligatoire des soins – a déjà connu de multiples rebondissements (voir encadré).

Les derniers en date viennent de la nouvelle règlementation fédérale qui introduit des changements majeurs.

L’article 37 LAMal nouveau prévoit que les fournisseurs de prestations, de fait les médecins, « doivent avoir travaillé pendant au moins 3 ans dans un établissement suisse reconnu de formation postgrade, dans le domaine de spécialité faisant l’objet de la demande d’admission ». Ainsi, ce qui constituait une exception à la clause du besoin et permettait à tout médecin formé en Suisse de s’installer devient une condition nécessaire mais pas suffisante à l’autorisation de s’installer en pratique indépendante. Il en va de même pour les médecins qui désirent s’installer à titre dépendant. Ce régime ne prévoit qu’une seule et unique exception : les services hospitaliers ambulatoires. Ces derniers ne sont en effet pas considérés comme des fournisseurs de prestations au sens de l’art. 35 al. 2 let. n LAMal.

Interdiction professionnelle et risque de pénurie

A la lettre, cette disposition instaure une véritable interdiction professionnelle pour les jeunes médecins formés en Suisse qui commencent à prendre conscience du danger. Dans le canton de Vaud, le régime transitoire, en attendant l’adoption par le Conseil d’Etat d’une nouvelle règlementation d’application, ouvre encore une brèche. En effet, l’actuel arrêté vaudois sur la limitation de l’admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l’assurance-maladie obligatoire (AVOLAF) [1] reste applicable.

Le nouveau régime fédéral est directement inspiré de la pratique vaudoise, laquelle avait déjà anticipé sur le nouveau régime et interprété avant l’heure de manière particulièrement restrictive le droit fédéral. Le nouveau régime prive les cantons d’une partie de leurs compétences en matière d’approvisionnement médical. De fait, à peine adoptée, cette nouvelle règlementation a alerté la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national sur les risques de pénurie. Celle-ci veut désormais introduire des exceptions.

Discussion entre le DSAS et la SVM sur les nombres maximaux

La seconde innovation prévue à l’article 55a LAMal, particulièrement en son alinéa 2, stipule que « le Conseil fédéral définit les critères et les principes méthodologiques pour fixer les nombres maximaux ». Cette méthodologie est décrite plus en détail dans l’ordonnance du 23.6.21 sur la fixation de nombre maximaux de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires [2].

Les travaux qui en découlent ont permis au permis au Canton de Vaud d’établir une première projection pour 11 spécialités. Ce résultat a été soumis par la SVM aux spécialités concernées en vue d’un premier examen qualitatif. Abstraction faite des vicissitudes liées à l’application des régimes successifs de cette limitation, il y a de bonnes raisons d’en attendre une application raisonnable.

L’article 55 a LAMal, al. 1 notamment, laisse encore aux cantons la latitude de limiter ou non le nombre de médecins, en disant explicitement « lorsque qu’un canton limite » et à l’alinéa 5 « en cas de limitation des admissions ».

Convention en cours

La convention de partenariat DSAS-SVM fait de la démographie médicale et de la clause du besoin des thèmes identifiés de collaboration. Désormais, il est admis par les deux parties d’établir une convention spécifique à ce sujet qui est actuellement en discussion. Il est de bon augure d’en revenir à une approche commune et structurée de la co-régulation médicale. Personne n’a intérêt économiquement, et les médecins non plus, à une pléthore médicale sectorielle si elle est avérée.

A première vue, l’approche se déroulerait en deux temps. Premièrement, il s’agit de s’accorder sur les disciplines qu’il a lieu d’exclure du champ de la limitation sur la base d’un examen concerté avec la SVM et ses groupements mais aussi les services formateurs. Deuxièmement, il convient d’élaborer une méthode plus fine permettant de préciser les critères de régulation dans les disciplines où la régulation paraît nécessaire à toutes les parties prenantes.

Le tout trouverait sa traduction dans la future règlementation cantonale qui doit succéder à l’AVOLAF d’ici au 30 juin 2023. Les discussions se poursuivent dans un esprit que nous voulons constructif, sur la base d’un état des lieux et d’une vision si possible partagés.

Références

[1] Arrêté vaudois sur la limitation de l’admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l’assurance-maladie obligatoire (AVOLAF), RS: 832.05.1 ; https://prestations.vd.ch/pub/blv-publication/actes/consolide/832.05.1?key=1658399825993&id=063ec4a3-78c3-4859-a9fc-eac51d3fa9c5

[2] Ordonnance sur la fixation de nombres maximaux de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires, RS : 832.107 ; https://www.fedlex.admin.ch/eli/cc/2021/391/fr

Deux décennies d’engagement

En 2000, la SVM organisait, à Berne, une manifestation réunissant 5’000 opposants à la clause du besoin. Cette action sera suivie d’un recours au Tribunal Fédéral à l’initiative de la SVM et de l’ASMAV, et de plusieurs tentatives pour contribuer à assouplir cette règlementation, pourtant adoptée en 2002. En ce sens, rappelons que la SVM a signé une convention avec le DSAS, en 2010, pour co-réguler la densité médicale par région et qu’elle a favorisé l’adoption de sa version « light » en 2013. Mais aujourd’hui, face à la pénurie de médecins et de ses conséquences pour les patients, la possible introduction de nouvelles restrictions constitue une relance dans le bras de fer avec les autorités : l’occasion pour la SVM de réaffirmer sa mission et son souhait de collaborer avec le Canton via une convention spécifique. Car la situation actuelle prive les patients de médecins libéraux et étrangers qui assureraient pourtant la relève là où elle vient à manquer localement.

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