Télémédecine: compléments d’information suite à la visioconférence SVM de décembre 2020

01.02.21 | Proposé par: Dre Sanae Mazouri

Dans le cadre de l’événement de fin d’année 2020 organisé en ligne par la SVM, une sensibilisation aux bonnes pratiques de la téléconsultation a été proposée par la Dre Sanae Mazouri, responsable des projets de télémédecine aux HUG. Cette présentation (à voir ou revoir ici) ayant suscité de nombreuses questions de la part des participants, la Dre Mazouri a accepté de rédiger cet article de blog visant à apporter les compléments d’information souhaités.

Protection des données 

Lors de consultations de télémédecine, le médecin est tenu de respecter les principes usuels relatifs au dossier médical du patient, ainsi que les dispositions régissant la protection de données, le secret médical et le devoir de diligence

Il est garant des informations médicales qui lui sont confiées (art. 3 de la loi fédérale sur la protection des données (LPD)).

En cas d’utilisation de logiciels, d’applications mobiles et de solutions cloud, les données médicales sont potentiellement accessibles par des tiers, souvent situés à l’étranger, aucunement soumis au secret professionnel. Il est du devoir du médecin de garantir le même niveau de sécurité et de confidentialité des données médicales tout en préservant les droits du patient lorsque celles-ci sont traitées par des tiers. Pour ce faire, il doit conclure un contrat de confidentialité avec ce « sous-traitant » ou accepter des conditions générales et une politique de confidentialité, respectant les principes de protection des données et garantissant le secret médical conformément à la LPD.

Enfin, la FMH rappelle que « si les données sont stockées dans un endroit non soumis au droit suisse en matière de protection des données (p. ex. parce qu’elles sont stockées dans un système de cloud basé à l’étranger) et que le prestataire n’est pas disposé à s’engager à appliquer la législation suisse, le médecin est tenu d’en informer le patient par écrit. »

Communication par courriel 

Un contact par écrit et différé, par exemple par courriel, discussion instantanée ou service de messages courts n’est pas considéré comme un contact téléphonique selon l’OFSP.

Cependant, les positions tarifaires 00.0110 et ss peuvent être appliquées à une consultation par courriel si elle répond aux critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité (EAE). En particulier, « une qualité identique de traitement que lors d’un contact physique avec le patient doit être garantie ».

Dans ce cas, « les courriers électroniques aux patients peuvent être facturés avec les positions tarifaires de la consultation médicale téléphonique et plus exactement la position tarifaire 00.0110 Consultation téléphonique par le spécialiste, première période de 5 min, et les suivantes.

Cette recommandation s’adresse également aux médecins spécialistes en psychiatrie et psychothérapie, qui peuvent facturer leurs courriels aux patients avec la position tarifaire 02.0060 Consultation téléphonique par le spécialiste en psychiatrie, pour les personnes au-dessus de 6 ans et de moins de 75 ans, par période de 5 min, et les suivantes. »

A noter que la SVM propose gratuitement à ses membres d’obtenir un e-mail sécurisé dans le domaine @svmed.ch, hébergé en Suisse sur le serveur de la SVM. Ce dernier est reconnu par tous les partenaires de la santé, à la différence de la plupart des autres domaines d’usage privé. Pour en savoir plus et obtenir votre adresse personnalisée, rendez-vous sur ce lien.

Consultation téléphonique et prestations Tarmed

Les prestations à distance sont facturables si elles remplacent une consultation en présence et si elles constituent un contact verbal direct et simultané :

  • Le médecin doit informer au préalable les patients qu’il s’agit d’une prestation payante.
  • La seule position tarifaire actuellement disponible pour facturer les prestations de télémédecine est la position « Consultation téléphonique par le spécialiste » (positions tarifaires 00.0110 et ss).
  • Son champ d’utilisation est strictement délimité, puisqu’elle permet en règle générale de facturer 20 minutes par consultation, mais 30 minutes pour les enfants de moins de 6 ans et les personnes de plus de 75 ans, ainsi que pour les personnes au-dessus de 6 ans et de moins de 75 ans nécessitant plus de soins.
  • Dans le domaine de la psychiatrie, le médecin pourra recourir aux positions tarifaires spécifiques « Consultation téléphonique par le spécialiste en psychiatrie » 02.0060, 02.0065 et 02.0066.
  • Les prestations de télémédecine des psychiatres ou des psychologues délégués exerçant au cabinet sont à nouveau* soumises aux limitations fixées le 1.1.2018 par le Conseil fédéral dans le TARMED 01.09_BR.
  • Les limitations applicables sont à respecter pour toutes les prestations.
  • La consultation téléphonique peut être facturée plusieurs fois par jour.

*Durant la 1ère vague, l’OFSP avait admis des assouplissements avec notamment la possibilité d’appliquer les limitations et les règles de facturation  identiques à celles s’appliquant aux consultations de base en cabinet. La validité de ces recommandations était cependant limitée à la durée de validité de l’ordonnance 2 Covid-19 du 13 mars 2020.

Voir aussi : Fiche d’information OFSP – Prise en charge des coûts des prestations ambulatoires à distance dans le cadre de la pandémie de Covid-19

Télépsychiatrie et Covid-19

En décembre 2020, l’OFSP a publié un rapport intitulé « La santé psychique en période de coronavirus », montrant les répercussions de la pandémie sur l’état d’esprit de la population.

Le CHUV a mis en ligne une série de ressources montrant comment les services de santé mentale se sont adaptés à la crise du Covid-19 pour continuer à assurer la prise en charge des patients atteints de maladies psychiatriques, ainsi que les nouveaux patients en souffrance face à la pandémie et au semi-confinement (anxiété, dépression, burn-out lié aux conditions de télétravail, violences intra-familiales, etc.).

Selon le Prof. Yasser Khazaal, psychiatre dans le Service de médecine des addictions dans le Département de psychiatrie du CHUV, « les thérapies délivrées en visioconférence offrent un impact clinique similaire à celui obtenu dans les traitements en face à face sans compromettre l’alliance thérapeutique. » Dans un article paru dans la Revue Médicale Suisse, il donne quelques recommandations de bonnes pratiques en télépsychiatrie.

La télépsychiatrie a joué et continue de jouer un rôle essentiel, permettant notamment un accès rapide (à travers des hotlines) à des spécialistes en santé mentale, afin d’assurer un soutien, un tri et une orientation rapide des patients dans le réseau de soins de santé mentale.

La 3e vague ne sera pas seulement une vague de patients atteints par les nouveaux variants du virus Sars-CoV-2 mais également de patients et soignants en souffrance psychologique. Il faut ainsi poursuivre l’assouplissement des règles en matière de facturation des actes de télépsychiatrie, ainsi que ceux des psychologues, afin d’assurer une réponse de qualité face à cette nouvelle situation sanitaire.

Voir aussi: Crise Covid-19 : Recommandations pour les soignants et patients en santé mentale (L’Encéphale)

Télémédecine et personnes âgées 

Les personnes âgées constituent une population à risque d’exclusion en télémédecine, du fait de leurs difficultés d’accès à un équipement informatique adéquat ou encore de troubles de l’audition ou des fonctions cognitives. La présence d’un proche aidant ou d’un soignant à domicile est une solution acceptable dès lors que le patient donne son consentement.

Les Hôpitaux universitaires de Genève ont développé une version de l’application HUG@home offrant un service de téléconsultation assistée par une infirmière de l’Imad, Institut de maintien à domicile genevois, pour des patients suivis à domicile ou résidents en EMS.

Prochainement, l’application HUG@home et sa version pour les médecins de ville doctor@home offriront la possibilité aux patients qui le souhaitent d’être assistés par un tiers (proche aidant, soignant à domicile ou encore interprète pour les patients allophones, ou en langue des signes pour les malentendants).

Télémédecine et nouveaux patients

Il n’y a pas de données dans la littérature concernant la qualité et la sécurité d’une téléconsultation avec un nouveau patient, comparativement à un patient que l’on suit depuis plus longtemps, mais il semble évident qu’une téléconsultation sera plus aisée et probablement plus fiable avec un patient pour qui le médecin a accès au dossier médical (antécédents, traitements en cours, éventuelles allergies) et avec qui une relation de confiance existe déjà.

Dans une large étude américaine, les patients ont d’ailleurs montré une nette préférence à bénéficier de téléconsultations avec leur médecin traitant habituel plutôt qu’avec un autre médecin.

Dre Sanae Mazouri, directrice médicale du Centre Médical Terre-Bonne à Eysins et responsable des projets de télémédecine aux HUG

NB: Pour en savoir plus sur la relation de soins en télémédecine, voir aussi cet article publié en octobre 2020 sur ce blog par la Dre Sanae Mazouri, également paru dans le CMV 4 – 2020.

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